Dans l'exercice de leur profession, les agents immobiliers sont susceptibles d'être sollicités en vue de la réalisation d'un acte de cession de parts sociales. La rédaction d'un tel acte nécessite de définir précisément le cadre juridique le régissant. Plus concrètement, il s'agit notamment, pour les agents immobiliers, de savoir si l'acte de cession de parts sociales est soumis à la loi Hoguet du 2 février 1970 et à son décret d'application du 20 juillet 1972.
La loi Hoguet et son décret d'application, bien connus par les praticiens de l'immobilier, régissent l'exercice de la profession de l'agent immobilier. Ces textes imposent notamment des obligations en matière d'accès à l'exercice de la profession (détention d'une carte professionnelle), d'affichage d'honoraires, de durée de mandats, de garantie financière et d'assurances, de tenue d'un registre de mandats…
Aussi, la question de la soumission aux dispositions précitées, aux cessions de parts sociales, présente une importance toute particulière.
À cet égard, le champ d'application de la loi Hoguet est précisé par les points 1, 4 et 5 de son article premier, retenant son application aux personnes que se livrent, à titre habituel et pour le compte d'autrui, aux opérations suivantes :
- "La souscription, l'achat, la vente d'actions ou de parts de sociétés immobilières ou de sociétés d'habitat participatif donnant vocation à une attribution de locaux en jouissance ou en propriété ;
- L'achat, la vente de parts sociales non négociables lorsque l'actif social comprend un immeuble ou un fonds de commerce".
La première hypothèse visée par la loi Hoguet traite des sociétés civiles d'attribution, forme sociale en voie de disparition.
La seconde hypothèse est davantage susceptible d'intéresser les praticiens actuels de l'immobilier.
Première observation, cette seconde hypothèse vise les "cession de parts sociales", et non la cession d'actions. Il en résulte qu'échappent à la règlementation de la loi Hoguet, les cessions d'actions de sociétés anonymes (SA) et de société par actions simplifiées (SAS), et ce même si ces dernières détiennent un ou plusieurs biens immobiliers ou un fonds de commerce.
Une telle cession peut, en conséquence, être réalisée par tout intermédiaire, indépendamment de sa qualité d'agent immobilier.
En revanche, les cessions de parts sociales de sociétés civiles (SCI), de sociétés en nom collectif (SNC) ou de société à responsabilité limitée (SARL), sont soumises aux dispositions de la loi Hoguet, dès lors qu'elles détiennent un actif immobilier ou un fonds de commerce.
Afin d'illustrer la frontière parfois ténue, du champ d'application de la loi Hoguet et de son décret d'application en matière de cession de parts sociales, l'analyse de la jurisprudence s'avère être d'une aide précieuse.
La Cour de cassation s'est notamment prononcée par un arrêt relativement récent du 27 juin 2018 (Cass. com, 27/06/2018, n°16-23.848), sur la soumission aux dispositions précitées, d'une cession de parts sociales d'une SARL d'expertise comptable.
Un mandat de recherche de "titre d'une entité ou la clientèle d'une entité" de société d'expertise comptable a été conclu entre une société d'expertise comptable et une agence immobilière.
Une fois l’opération de cession de parts sociales réalisée, la société mandante refuse de régler à l’agence immobilière les honoraires dus aux termes du mandat signé, d’un montant de 31.750€, au motif que l’agence immobilière n’aurait pas respecté ses obligations résultant de la loi Hoguet et de son décret d’application.
L’agence immobilière assigne la société d’expertise comptable en paiement des honoraires stipulés.
La société développe les arguments suivants devant la juridiction, afin d’échapper au paiement de la commission de l’agent immobilier :
- La cession portant sur des parts sociales de société commerciale par la forme, ladite société était nécessairement titulaire d’un fonds de commerce pour l’exercice de son activité ;
- La cession était susceptible de conduire à l’acquisition d’un immeuble.
Ces deux circonstances devaient, selon l’argumentation soutenue par la société d’expertise comptable, conduire à soumettre ladite cession aux dispositions de la loi Hoguet ainsi qu’à son décret d’application, sur le fondement de son article premier, définissant son champ d’application, son 5° visant : « L'achat, la vente de parts sociales non négociables lorsque l'actif social comprend un immeuble ou un fonds de commerce ».
Cela étant, la Cour de cassation rejette ses arguments, au motif, d’une part, que les sociétés commerciales par la forme qui ont un objet civil ne sont pas nécessairement titulaires d’un fonds de commerce, d’autre part, que le mandat litigieux vise des « titres d’une entité ou la clientèle d’une entité », qui ont un caractère mobilier et non immobilier.
Il en résulte que la nature commerciale d’une société (SA / SNC / SARL), n’impacte pas nécessairement la nature de son exploitation, et ce notamment le cas où il s’agit, comme en l’espèce, d’une profession civile.
Cet arrêt rappelle l'importance pour les agents immobiliers de se munir de contrats présentant les plus hautes garanties juridiques.
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