Le 8 février, l'Association des responsables de copropriété (ARC) a publié un communiqué qui n'est pas passé inaperçu. Dans ce pamphlet, les logeurs affirmaient que les agents immobiliers avaient désormais recours à de faux pré-états datés pour faire gonfler leurs factures. Une accusation que Jean-Marc Torrollion, Président de la Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM), a vivement contesté.
Pourquoi l'état daté fait-il autant jaser ?
En tant que professionnel de l'immobilier, il y a un document sans lequel vous ne pouvez pas conclure une vente en copropriété. Vous l'aurez compris : il s'agit de l'état daté. Institutionnalisé par l'article 5 du décret 1967, l'état daté doit être remis au futur copropriétaire avant la signature de l'acte de vente. Dans ce document, ce dernier trouvera toutes les informations relatives aux finances des actuels propriétaires. Obligatoire, son dépôt se fait chez le notaire avant la remise des clés.
Le 1er juin 2020, un second décret a fixé le prix maximal de l'état daté à 380 €. Sauf que, selon l'ARC, le prix plafonné de l'état daté est volontairement dépassé par les syndicats immobiliers.
Pour défendre leurs positions, les responsables de l’ARC s'appuient sur une étude menée par la Direction générale de la concurrence de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Selon l'enquête susmentionnée, dans les faits, la délivrance de l'état serait facturée à environ 400 €, soit 5 % de plus que le tarif maximal.
Les premières victimes de l'inflation
Pour atténuer les effets de l’inflation, les syndicats de professionnels immobiliers n'ont eu d'autre choix que de réduire leurs tarifs personnels. Une décision qui ne semble pas prendre en compte l'ARC.
Pour Jean-Marc Torrollion, il est parfaitement normal que les agents immobiliers soient rémunérés pour l'établissement des états datés. En effet, selon la législation en vigueur, ils n'ont aucune obligation légale de le faire.
En foi de quoi, l'ARC ne saurait exiger d'eux qu'ils emploient des ressources sans aucunes compensations financières. Plus encore au vu de la quantité de travail à abattre.
Un état daté de plus en plus dense
Selon l’article 5 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967, l'état daté n'inclut que trois parties financières, lesquelles sont réparties sur un maximum de 5 pages. Néanmoins, sur le terrain, la réalité est tout autre.
Avant de devenir copropriétaire d'un logement, le futur acquéreur a besoin d'être rassuré. De même, les résidents actuels préfèrent coucher sur papier toutes les clauses de la cohabitation. Assurances protégeant l'immeuble, emprunts en cours, contrats régissant les interactions entre les habitations, ... L'état daté est désormais un rapport décrivant avec moult détails la situation d'un bien immobilier.
Forcément, cela se ressent sur l'épaisseur du document.
Au lieu de cinq pages, les agents immobiliers rédigent en moyenne 13 pages.
Pire encore : en plus de cet état daté, c'est souvent sur les frêles épaules de ce professionnel que repose la production du dossier technique et environnemental.
Un pré-état daté juridiquement inexistant mais exigé par les acheteurs
Au sens strict, la notion de pré-état daté n'existe pas. Seul l'état daté a une valeur légale. Toutefois, comment attendre de l'acheteur qu'il signe un contrat le jour J s'il ne l'a pas au préalable consulté ? En tant que professionnel immobilier, vous n'avez que trop conscience de ce dilemme.
Afin que la transaction soit finalisée, les deux parties doivent avoir une connaissance des engagements qu'ils sont sur le point de prendre. C'est une directive qui a d’ailleurs été consolidée par la loi L721-2 du Code de la Construction et de l’Habitation.
En s'en tenant à la réglementation en vigueur, il ressort que techniquement, c'est aux vendeurs d'établir l'état pré-daté. Or, étant donné que ces derniers ne possèdent pas les compétences suffisantes pour accomplir cette mission, ils préfèrent laisser les agents immobiliers s'en charger. Pour Jean-Marc Torrollion, c'est de la sous-traitance, une prestation qui se doit d’être rémunérée.
Il est incongru de se baser uniquement sur le chiffre avancé par la DGCCRF pour indexer les agents immobiliers.
Ces derniers sont loin d'être les premiers bénéficiaires du capharnaüm juridique entourant l'état daté. Allant au-delà de leurs habilitations, ils ont à cœur de tenir la promesse faite aux clients : acheter en toute sécurité. Et cette garantie a un coût.