La Cour de cassation a récemment eu à sa prononcer sur la demande d’un agent immobilier, tendant à voir condamner un couple au versement de dommages-intérêt d'un montant égal à sa commission sur le fondement de la responsabilité civile extracontractuelle, indépendamment de la réalisation de la vente (Cass, Civ 1ère, 19/01/2022, n°20-13.619).
En préambule à l’analyse de l’arrêt visé ci-avant, rappelons la règle générale encadrant la perception de la commission de l’agent immobilier, en matière de réalisation de la transaction.
L’article 6 de la loi n°70-9 du 2 janvier 1970 prévoit en son article 6, qu’aucun « bien, effet, valeur, somme d'argent, représentatif d'honoraires, de frais de recherche, de démarche, de publicité ou d'entremise quelconque, n'est (…) ou ne peut être exigé ou accepté par elles, avant qu'une des opérations visées audit article ait été effectivement conclue et constatée dans un seul acte écrit contenant l'engagement des parties ».
L’article 73 du décret n°72-678 du 20 juillet 1972 (décret Hoguet), prévoit en son dernier alinéa que l’agent immobilier perçoit sans délai sa rémunération une fois que l’opération conclue par son intermédiaire constatée par acte authentique (devant notaire).
Autrement formulé, le versement des honoraires de l’agent immobilier est notamment conditionné par la réalisation de la vente à laquelle il a concouru.
Cela étant, dans l’hypothèse où une vente n’aboutirait pas du fait de la négligence ou d’une faute de l’une des parties, l’agent immobilier pourra solliciter son l’indemnisation du préjudice subi du fait de la faute de cette partie, sur le fondement de la responsabilité extracontractuelle (ou délictuelle), qui prendra la forme de dommages-intérêts.
Ce préjudice sera constitutif du montant qu’il aurait dû percevoir au titre de la commission stipulée.
Cette voie de droit permettra ainsi à l’agent immobilier de recouvrer le montant de la commission qu’il aurait dû percevoir en l’absence de comportement fautif de l’une des parties à l’opération.
L’arrêt commenté dans le présent article traite précisément d’une telle hypothèse.
Les faits de l’espèce sont les suivants.
Le 14 janvier 2014, deux promesses de vente portant sur un fonds de commerce et sur des murs mitoyens sont singés par les parties.
La vente ne s’est néanmoins pas réalisée, au motif que les acquéreurs n’avaient pas obtenus le financement nécessaire.
Le 20 décembre 2017, l’agent immobilier assigne les acquéreurs en paiement de dommages-intérêts, sur le fondement de leur responsabilité civile délictuelle.
En l’espèce, les deux promesses de vente prévoyaient que « l'indemnisation du mandataire pour le préjudice causé par la faute de l'acquéreur défaillant est subordonnée à ce que le vendeur ait lui-même agi, avec succès, devant le tribunal compétent aux fins de déclarer la condition suspensive du prêt réalisée et que ces dispositions interdisent à l'agent immobilier de contourner ces conditions par le recours au mécanisme de la responsabilité délictuelle ».
La Cour d’appel de Reims, dans le cadre d’un arrêt du 22 novembre 2019, fait application de ladite clause, et rejette en conséquence le recours de l’agent immobilier, dès lors que les vendeurs n’ont pas agi à l’encontre des vendeurs.
Le mandataire se pourvoit en cassation, en soutenant que les textes régissant la responsabilité délictuelle étant d’ordre public, leur application ne saurait être limitée ou neutralisée contractuellement, et qu’en conséquence, une telle clause devrait être laissée inappliquée.
C’est le raisonnement ici suivi par la Cour de cassation, qui rejette l’application de cette clause, et casse l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Reims.
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