La CNIL souhaite mettre fin à la pige immobilière ?

By septembre 22, 2023

La pige immobilière est en danger ! La CNIL pourrait empêcher les professionnels de l'immobilier de réaliser leur pige immobilière dans les semaines ou mois à venir. La mobilisation des agences immobilières est plus que jamais nécessaire !

 

Le 1ᵉʳ août 2023, la Commission Nationale Informatique et Liberté (CNIL), lance une consultation publique ouverte jusqu’au 15 octobre 2023, portant sur un projet de guide pratique relatif à la réutilisation des données publiques.

 

Nous en appelons à l’ensemble des acteurs du marché de l’immobilier, en les incitant fortement à répondre à l’enquête publique initiée par la CNIL, en vous rendant sur le site de la CNIL.

 

Des arguments tant juridiques que factuels sont exposés au sein du présent article, afin d'étayer les réponses apportées à l'enquête publique, n’hésitez pas à vous en inspirer !

 

La pige immobilière est directement impactée par ce projet de guide pratique, dont divers passages visent directement à exclure la base légale de l’intérêt légitime, pour les opérations consistant en la réutilisation des données publiques présentes sur des sites de petites annonces entre particuliers.

 

À cet égard, un bref rappel doit être effectué sur la règlementation actuelle en matière de traitement des données personnelles.

 

 I. LA RÉGLEMENTATION ACTUELLE DU TRAITEMENT DES DONNÉES PERSONNELLES (RGPD).

 

Pour être licite, un traitement de données doit reposer sur l’une des « bases légales » prévues à l’article 6 du Règlement Général sur la Protection des données (RGPD).

 

L’activité de pige immobilière ne peut se fonder qu’exclusivement sur la base légale de l’intérêt légitime, prévue au point f de l’article 6 du RGPD :

 

« f) tous les cas de rediffusion de données déjà publiées ne pourront pas se fonder sur la base légale de l’intérêt légitime. Il existe effectivement une différence d’enjeux et d’impacts entre l’établissement de profils nominatifs de particuliers, sur la base d’une agrégation de toutes les données en ligne les concernant, et la « simple » rediffusion de données d’entreprises par ailleurs diffusées par des administrations dans le cadre de leurs missions légales. Pour ce type de traitements, auxquels les personnes concernées ne sauraient raisonnablement s’attendre, seul le recueil de consentements valables auprès de celles-ci devrait permettre de garantir leur licéité ».

 

Or, ce projet de guide pratique vise notamment, en page 14, paragraphe 5, au titre des activités n’apparaissant pas pouvoir valablement fonder un intérêt légitime au traitement des données :

 

« La réutilisation des coordonnées électroniques publiques par des utilisateurs de sites de petites annonces entrer particuliers à des fins de commercialisation de bases de prospection (p.ex. : auprès d’agences immobilières, s’agissant d’annonces dédiées à la location / vente de logements) ».

 

Les paragraphes 8 et 9 précisent que :

 

 « Tous les cas de rediffusion de données déjà publiées ne pourront pas se fonder sur la base légale de l’intérêt légitime. Il existe effectivement une différence d’enjeux et d’impacts entre l’établissement de profils nominatifs de particuliers, sur la base d’une agrégation de toutes les données en ligne les concernant, et la « simple » rediffusion de données d’entreprises par ailleurs diffusées par des administrations dans le cadre de leurs missions légales.

Pour ce type de traitements, auxquels les personnes concernées ne sauraient raisonnablement s’attendre, seul le recueil de consentements valables auprès de celles-ci devrait permettre de garantir leur licéité ».

 

Il résulte du contenu de ce guide pratique que les acteurs de pige immobilière ne pourront plus fonder le traitement des données sur la base légale de l’intérêt légitime.

 

La CNIL explique qu’il reviendrait aux responsables de traitement des opérations visées de recueillir le consentement préalable et individuel de chaque annonceur.

 

Compte tenu du nombre extrêmement important d’annonces générées chaque jour, il est strictement impossible aux acteurs de la pige immobilière d’obtenir le consentement de chaque annonceur, ce dont la CNIL a parfaitement conscience. En outre, obtenir le consentement de l'annonceur induit le traitement préalable des données : en effet, comment obtenir un consentement sans entrer en contact avec l'annonceur ?

 

En conséquence, l’avenir du secteur de la pige immobilière, est gravement menacé par cette interprétation rigoriste et inadaptée à la réalité du marché par la CNIL de la notion d’intérêt légitime.

 

 

II. UNE LECTURE CONTESTÉE PAR LE SECTEUR DE LA PIGE IMMOBILIÈRE.

 

Cette position de la Commission est éminemment contestable.

 

1. La pige immobilière, bien loin de renforcer le démarchage commercial auprès des annonceurs, permet au contraire de fluidifier le marché, en proposant aux agences immobilières une plateforme unique recensant une part importante des annonces, dont les auteurs ne s’opposent pas à la réutilisation de leurs données.

 

En effet, les outils de pige immobilière, tels que PigeOnline, portent une attention toute particulière à la protection des données des annonceurs.

 

C’est ainsi que l’ensemble des annonces relevées font l’objet, en amont de leur publication sur le site de pige, d’un tri portant sur des mots clés tels que « agences s’abstenir », « pas d’agences » ou « démarchage ».

 

Il en résulte que les droits des annonceurs, sont non seulement respectés par les acteurs de la pige immobilière, mais plus encore, renforcés.

 

En effet, il ne fait aucun doute qu’en l’absence de tels outils, la réalité du marché immobilier s’imposera en amenant les agences immobilières à procéder à un réel démarchage commercial, auprès de chaque annonceur, fût-il opposé à toute opération de démarchage.

 

 

2. La CNIL fonde son argumentation sur la circonstance que les annonceurs ayant volontairement déposé leur annonce sur un site permettant à des particuliers de vendre directement leur bien, ils ne sauraient raisonnablement s’attendre à être démarchés par des professionnels de l'immobilier.

 

Ce faisant, la Commission base son argumentation sur un constat erroné en fait : à titre illustratif, la plateforme de diffusion d’annonces, Leboncoin (leader sur le marché), permet la création de compte de particuliers comme de professionnels, il est en conséquence factuellement faux de soutenir qu’il s’agirait d’un site d’annonces de particuliers à particuliers.

 

De surcroît, l’ensemble des agences immobilières diffusent leurs annonces sur les sites d’annonces en ligne, de sorte qu’en réalité, le marché des annonces en ligne, est majoritairement composé de professionnels, et ce, notamment dans le domaine de l’immobilier.

  

Les chiffres sont sans appel, la proportion des annonces de professionnels présents sur le site Leboncoin est de 88,39%, représentant 689.698 annonces au 22/09/2023 sur nombre total d’annonces de 780.286. Soit un nombre d’annonces immobilières déposées par des particuliers de 83.585 (11,61%) (données issues de la plateforme Leboncoin au 22/09/2023).

 

 

3. L’argument selon lequel les annonceurs ne s’attendraient pas raisonnablement à être contactés par des professionnels de l’immobilier, ne résiste pas davantage à l’examen de la réalité du marché.

 

En effet, comment expliquer, si les annonceurs ne pouvaient pas raisonnablement s’attendre à être contactés par des professionnels de l’immobilier, qu’une part importante des annonceurs fassent apparaître au sein de leurs annonces la mention « agences s’abstenir », « démarchage interdit », etc. ?

 

Cette seule circonstance suffit à démontrer, sans contestation possible, que les annonceurs de biens immobiliers, s’attendent plus que raisonnablement à être contacté par des professionnels de l’immobilier, puisqu’ils anticipent cette prise de contact.

 

Plus encore, étant établi que les annonceurs manifestent expressément leur intention de ne pas être démarché au sein de leur annonce, il est permis de supposer que les annonceurs ne faisant pas mention de leur opposition au démarchage, acceptent d’être contactés par des professionnels.

 

 

4. Enfin, la notion même de démarchage commercial employé par la CNIL pour désigner l’activité de pige immobilière est contestée.

 

En effet, l’objet principal de la pige immobilière ne consiste nullement en un quelconque démarchage commercial, mais bien au contraire, offre une protection supplémentaire aux annonceurs contre la pratique du démarchage commercial.

 

Cela s’évince de l’utilisation faite par les acteurs de l’immobilier des solutions de pige immobilière, lesquels permettent d’offrir une cartographie référençant des annonces des biens immobiliers actuellement sur le marché.

 

Partant, les agences immobilières utilisatrices de ces logiciels, agissant bien souvent dans le cadre d’un mandat de recherche immobilier conclu en amont, ne prennent pas contact avec les annonceurs aux fins de leur proposer leur service d’entremise, mais au contraire, vont présenter à leur mandant les biens en vente et correspondant à leurs critères de recherche.

 

Il s’évince de ce constat, que bien loin de consister en un simple outil de démarchage commercial, les outils de pige immobilière permettent, bien au contraire, de parvenir à la concrétisation de l’objectif de vente du bien publié.

 

En conséquence, non seulement, les outils de pige immobilière, tels PigeOnline, ne sont générateurs d’aucun démarchage commercial pour l’annonceur, mais surtout, lui procurent une visibilité supplémentaire dans le cadre de son objectif de vente (et ce, sans aucun coût).

 

 

Nous en appelons à l’ensemble des acteurs du marché de l’immobilier, en les incitant fortement à répondre à l’enquête publique initiée par la CNIL, en vous rendant directement sur le site internet de la CNIL.

 

N’hésitez pas à vous inspirer des arguments développés au sein de cet article pour exprimer votre opposition à l’analyse restrictive de la CNIL, qui aboutira, in fine, à la suppression pure et simple des outils de pige immobilière.

dernière modification le mardi, 26 septembre 2023 07:41