Attendue depuis plusieurs mois, la réforme de la copropriété est une opération inédite, publiée dans le Journal Officiel. Saluée pour ses nombreuses avancées, sa sortie génère toutefois de nombreux débats auprès des professionnels de l'immobilier qui regrette la suppression de son article phare : le plan pluriannuel de travaux ! Une disposition qu’ils jugeaient essentielle dans leurs propositions !
Le retrait du PPT, une mesure impopulaire
L'avis de Jean Marc Torollion, président de la FNAIM
Jean-Marc Torrollion, président de la Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM) qualifie de « surprise » le retrait de cet article rendant obligatoire un plan pluriannuel de travaux (PPT).
Cette disposition a fait l’objet de longs mois de travaux au sein du Conseil national de la transaction et de la gestion immobilière (CNTGI) et pour celui-ci la mise en place du plan pluriannuel des travaux aurait permis une « plus grande anticipation de la part des copropriétaires». Ce qui aurait été fort utile pour prévenir de nombreux sinistres comme celui de la rue d’Aubagne, à Marseille, le 5 novembre 2018 (incendies d'immeubles non rénovés).
L'avis de Géraud Delvolé, délégué général de l'Union des syndicats de l'immobilier
Pour sa part, Géraud Delvolvé, estime que ce retrait peut être justifié. Il pense que le caractère obligatoire du plan pluriannuel de travaux aurait pu souffrir de l’imprécision d’une planification des travaux dans l’espace et le temps. Géraud Delvolvé reconnaît tout de même que la mise en place obligatoire d’un plan pluriannuel de travaux aurait eu pour effet de stimuler les réflexes d’anticipation dans la gestion des copropriétés. Ces réflexes auraient eu pour corollaire une culture de la maintenance des bâtiments, surtout pour les immeubles de plus de 15 ans !
L'avis Henry Buzy-Cazaux, président de l'Institut du Management des Services Immobiliers
Henry Buzy-Cazaux, quant à lui, regrette que l’Ordonnance ne considère pas les propositions faites par les professionnels de l’immobilier. À son avis, le retrait de l’article 13 est préjudiciable pour deux raisons majeures :
- D’une part, le plan pluriannuel de travaux permettait d’étaler à court, moyen ou long terme les travaux de remise à niveaux des copropriétés de plus de 15 ans. Cette planification pluriannuelle aurait amené les copropriétaires à adapter les immeubles aux exigences légales, notamment en ce qui concerne la protection de l’environnement. Les travaux obligatoires auraient aussi concerné les opérations de réfection et de consolidation des architectures des immeubles.
- D’autre part, selon Henry Buzy-Cazaux, le renflouement des fonds alloués aux travaux allait se faire de manière permanente, ce qui aurait permis des planifications plus objectives.
Le président de l'Institut du Management des Services Immobiliers regrette également que l’État ait modifié le texte, sans avoir prévenu Hugues Périnet-Marquet. En effet, Hugues Périnet-Marquet est le président du Conseil national de la transaction et de la gestion immobilière (CNTGI), grand architecte du projet d’un plan pluriannuel de travaux. Il a découvert le retrait de l’article dans le Journal Officiel. En effet, quelques heures avant la publication de l’Ordonnance au Journal Officiel, le 31 octobre 2019, les professionnels de l’immobilier en France s’attendaient à une adoption du projet de mise en place obligatoire du plan pluriannuel de travaux. Mais tel n’est pas le cas !
Face à la déception des professionnels de l'immobilier, le ministre Julien Denormandie a néanmoins affirmé revoir sa copie et la fameuse mesure pourrait être réintroduite dans le texte dans les mois à venir !
Une réforme globalement satisfaisante
Une implication plus active et plus participative dans la gestion des immeubles
En dehors du retrait de l’article 13, Jean-Marc Torrollion, le président FNAIM se satisfait de l’expression de l’égalité juridique des copropriétaires. La réforme consacre une implication plus active et participative dans la gestion des immeubles. Tous les copropriétaires sont égaux dans les actions à entreprendre dans ce sens. Cette approche participative est matérialisée par la mise en place d’un régime juridique suffisamment égalitaire. Cette égalité écarte le risque d’un système ambivalent, qui pouvait provoquer, selon Jean-Marc Torrollion, des différences dans le traitement juridique et fiscal des copropriétés en France.
La prise en compte de la particularité des bâtiments
Le président de la FNAIM salue le fait que la réforme tienne compte des particularités de certains bâtiments (comme les immeubles professionnels) et les copropriétés de moindre envergure, qui requièrent une gestion moins rigoureuse.
Renforcement du rôle du syndicat des copropriétaires
Par ailleurs, il estime que la mise en place d’un syndicat des copropriétaires et le renforcement de son rôle sont des avancées remarquables. En effet, cette entité avait un rôle qui se réduisait à l’observation de la gestion des immeubles. Désormais, le syndicat sera responsable non seulement de la bonne gestion, mais aussi de la politique de conservation et d’amélioration de l’état des lieux. Ainsi, le syndicat des copropriétaires joue un rôle clé dans le respect des exigences qu’imposent les logements de plus de 15 ans. Le président de la FNAIM s’attend à plus d’efficacité de la part de ces organisations, dont le rôle est un peu plus accru. Les attributions du syndicat et les nouvelles possibilités qui lui sont données constituent des avancées, pour plus d’efficacité dans la gestion immobilière.
Assouplissements dans les procédures de prise de décision
La Fédération nationale de l’immobilier retient deux aspects positifs de cette réforme de la copropriété :
- D’abord, les assouplissements dans les procédures de prise de décision dans le fonctionnement des copropriétés sont notables : La dématérialisation des votes, avec l’introduction du vote par correspondance lors des assemblées générales des copropriétaires, est une avancée remarquable, très appréciée des professionnels
- Ensuite, l’aménagement des nouveaux modes de gestion des copropriétés est satisfaisant. La réforme prescrit la possibilité de segmenter une copropriété contenant plusieurs bâtiments, de manière à ce que chaque subdivision corresponde à un sous-syndicat de copropriétaires. Toutes ces mesures sont saluées par la FNAIM.